Natalie Brasse : l’instinct, les détours et l’appel du leadership

mai 21, 2025

À 35 ans, Natalie Brasse vient de prendre la tête de la Charles Telfair Leadership Academy. En poste depuis quatre mois, elle semble déjà dans son élément. « Je suis super contente », confie-t-elle avec un sourire franc. Après plus d’une décennie dans l’industrie, elle revient dans un environnement qui, au fond, ne l’a jamais vraiment quittée : celui de l’apprentissage, de la transmission, du développement personnel et professionnel.

 

Rien, pourtant, ne la prédestinait à ce parcours. Ou plutôt, tout. Son histoire est faite de choix, de retours en arrière et de rebonds. « J’ai grandi à Baie-du-Tombeau, dans une famille où le droit avait une place importante. Mon père est clerc de notaire. Il espérait que l’une de ses deux filles devienne notaire. » Elle entame donc des études de droit en France, soutenue par une bourse. Mais au fil des mois, une évidence s’impose : « Ce n’était pas ma filière de cœur. » Elle décroche un DEUG, mais abandonne l’idée de poursuivre.

 

Retour à Maurice. Elle bifurque vers la littérature française, son véritable amour. « À la base, je voulais être prof de lettres », dit-elle. Une licence obtenue à l’université de Maurice la mène à candidater dans l’enseignement. En attendant, elle cherche un job temporaire. Réceptionniste. Copywriter. Puis, un premier pied dans le monde corporatif : un contrat chez Cameron, au sein du groupe Taylor Smith. Une rencontre décisive.

 

C’est Heba Capdevila, alors DRH du groupe, qui lui propose un poste de Management Trainee. Ce sera le début d’une aventure de plus de dix ans. « Je n’ai jamais quitté le groupe. C’était une école incroyable pour moi. » Elle grimpe les échelons. Project Lead, Project Manager, puis responsable d’une entreprise du groupe, Ocean Goers, spécialisée dans le recrutement et la formation pour MSC Croisières. Elle voyage, se forme à bord des navires.


« Je n’ai eu aucun regret de ne pas avoir enseigné. J’ai découvert un monde extrêmement riche. » Taylor Smith lui permet de compléter un MBA, de travailler sur des acquisitions, de toucher à des secteurs aussi variés que le ciment, les produits d’entretien, ou le développement stratégique.

 

En 2020, la Covid bouscule tout. Son mari reçoit une opportunité à Dubaï, la famille part. Natalie continue à distance, explore aussi de nouveaux horizons avec Accuracy, une entreprise de conseil. Mais la maladie de son père la ramène à Maurice. « Au début, c’était temporaire. Mais je ne me voyais pas repartir. Mon noyau était ici. »

Le groupe Taylor Smith l’accueille à nouveau. Elle y passe encore quelques années, entre projets transverses, Cementis, Cernol… Jusqu’à ce que, sur LinkedIn, une annonce attire son attention. Charles Telfair Education cherche un Head of Leadership Academy. « J’avais déjà vu passer ce poste. Et je m’étais dit : un jour, j’aimerais bien. » Elle postule. Le feeling est immédiat avec les équipes. « Deux jours après, on m’a rappelée. Le jour même de mon deuxième entretien, on m’a dit : on te prend. »

Aujourd’hui, Natalie pilote l’Académie avec énergie. Elle travaille étroitement avec les équipes RH de grands groupes mauriciens — Eclosia, ENL Rogers, Leal, Swan, entre autres — pour proposer des programmes adaptés aux besoins de leurs collaborateurs. Le Leadership Challenge Programme (LCP) pour les team leaders, le Management Development Programme (MDP) pour les cadres plus expérimentés. « On ne fait pas de la formation pour cocher une case. Il faut que ça ait du sens. » Elle insiste sur l’importance de personnaliser les contenus. « On essaie de ne pas réinventer, mais de faire évoluer. L’année dernière, on a intégré un module sur la pleine conscience et la gestion du stress. » Elle observe aussi les évolutions du marché. L’intelligence artificielle, notamment. « On vient de lancer The Art of Selling in the AI Era, un programme pour les équipes commerciales. C’est un besoin que beaucoup ont, mais qui n’était pas encore traité. »


Installée à Albion depuis deux ans, Natalie mène sa vie entre travail, famille et réflexion.
Sa trajectoire n’est pas linéaire. Mais elle est cohérente. « Je crois qu’on a des anges gardiens », glisse-t-elle. Et peut-être aussi un instinct sûr, une capacité à sentir quand il faut avancer, bifurquer, ou revenir.